Responsabilité et obligation de conseil de l’avocat :
L’avocat, en tant que conseiller juridique et défenseur de son client, est tenu à une obligation de conseil. Il doit fournir des informations claires et pertinentes sur les chances de succès d’une action, les risques encourus et les meilleures stratégies à adopter. Mais qu’advient-il lorsqu’un avocat manque à ce devoir ? La jurisprudence récente nous éclaire sur les conditions d’engagement de sa responsabilité civile professionnelle.
L’obligation de conseil : une exigence fondamentale
L’obligation de conseil se manifeste par plusieurs aspects :
- Informer et orienter son client : l’avocat doit expliquer les risques et chances de succès d’une action judiciaire.
- Prévenir les erreurs et vices de procédure : il doit veiller au respect des délais et à l’adéquation de la stratégie juridique choisie.
- S’assurer du consentement éclairé du client : la décision finale d’intenter ou non une action appartient au client, mais l’avocat doit lui fournir tous les éléments nécessaires à une décision en toute connaissance de cause.
L’engagement de la responsabilité civile professionnelle : enseignements de la jurisprudence
La responsabilité d’un avocat ne peut être engagée qu’en cas de faute avérée, c’est-à-dire lorsqu’il a manqué à son devoir de conseil ou s’il a commis une erreur dans l’orientation stratégique d’un dossier.
Conseil d’État, 20 décembre 2024, n°488061 : Dans cette affaire, un avocat aux conseils avait conseillé à son client de renoncer à un pourvoi en cassation, estimant que l’action avait peu de chances d’aboutir. Or, le client a ultérieurement tenté d’engager la responsabilité de son avocat, estimant qu’il avait été dissuadé à tort de poursuivre son action.
Le Conseil d’État a rappelé plusieurs principes clés :
- Le choix d’intenter ou d’abandonner une action appartient exclusivement au client.
- L’avocat conserve une liberté quant aux moyens qu’il estime utiles, mais il doit informer son client des chances de succès.
- La responsabilité de l’avocat ne peut être engagée que s’il a dissuadé à tort son client d’agir alors que l’action avait des chances manifestes d’aboutir.
Dans cette affaire, le Conseil d’État a finalement rejeté la demande du justiciable, estimant que l’avocat n’avait pas commis de faute, car le client avait bien été informé et avait pris sa décision en toute connaissance de cause.
Comment les avocats peuvent se prémunir contre un risque de mise en cause ?
Pour éviter toute contestation, un avocat doit :
- Fournir un conseil écrit lorsque la situation l’exige, afin de tracer son analyse juridique.
- Expliciter les avantages et risques de chaque option pour permettre au client de prendre une décision éclairée.
- Veiller à la transparence des échanges et conserver des preuves des conseils donnés.
La mise en cause de la responsabilité d’un avocat pour un défaut de conseil reste exceptionnelle. Toutefois, la prudence et la rigueur dans la relation client sont essentielles pour éviter tout risque de contentieux. En d’autres termes, il faut faire preuve de transparence sur les chances de succès, même si nous ne sommes pas à l’abri d’une évolution de la jurisprudence. Il existe un aléa dans toute procédure et il ne peut être garanti au client qu’il va obtenir gain de cause.
La jurisprudence récente rappelle que seule une faute caractérisée peut entraîner l’engagement de sa responsabilité. Un avocat diligent, qui informe précisément son client des risques et chances de succès, limite considérablement son exposition à ce type de litige, même s’il n’élimine pas toutes velléités de son client à le rendre responsable de l’échec d’une action judiciaire.
Auteur : Vincent DURAND